je me suis engagée
à au moins être là
présente, ouverte
témoigner de l’expérience
écrire le paradoxe
mais ça
c’était avant
quand tout avait un sens
encore reconnaissable
nommable
on voulait se rencontrer ici
quand ici signifiait
quelque chose de précis
le même ici
où j’écris ceci
en ce territoire qu’on nomme
Tiohtià:ke ou Mooniyaang
ou Montréal, selon
qui parle et à qui
c’est ainsi qu’on l’aurait nommé
nous aussi
on n’aurait pu
réfléchir l’ici
l’être ensemble
comme il s’est imposé
à nous, finalement
chacun·e là où nous étions
figé·es sur place
fragmenté·es dans l’espace
de nos refuges
de part et d’autre
d’un territoire, d’un océan
de nos écrans
Se donner corps et âme, en pandémie.
Marilou Craft, « Temps présent(s) » (extraits), En réponse à vulnérables paradoxes, édité et accessible en ligne par PME Art/Jacob Wren, p. 44 et 46.